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« La Francophonie économique ne doit être ni un slogan ni un vœu » (Interview exclusive)

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Précédé d’une réputation d’observateur engagé, d’intellectuel rigoureux, et d’entrepreneur à succès, le Tunisien Radhi Meddeb est l’un des rares analystes à faire l’unanimité en Afrique du Nord. En acceptant de parrainer la première édition du festival de l’intelligence économique du 17 novembre 2022, en marge du XVIIIè sommet des chefs d’Etats et de gouvernements de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) à Djerba, ce polytechnicien essayiste a ravivé la flamme de son engagement au service de la Francophonie et de son continent. Il les déchiffre ici avec une passion lucide et une précision essentielle.

Financial Afrik : Comment appréhendez-vous la Francophonie économique aujourd’hui ?

Radhi Meddeb : La Francophonie économique est encore balbutiante aujourd’hui. Certes, il y a des expériences de ci de là, mais elles demeurent parcellaires. Globalement, la Francophonie économique est encore dans les limbes. Son potentiel de développement est important. Il est à la hauteur des exigences et de l’ambition de ses populations et plus particulièrement de ses jeunes. La Francophonie économique doit se construire si les pays ayant en partage la langue de Molière, expriment une volonté partagée de sauvegarder la Francophonie tout court. Le mouvement de la Francophonie, lancé par ses pères fondateurs, il y a un peu plus de cinquante ans ne pourra continuer à se développer, plus encore, à exister, à revendiquer une place reconnue dans le concert des nations et des institutions internationales que s’il arrive à donner de l’espoir et du sens à ses populations. Dans une globalisation qui s’impose à tous et qui continuera à s’imposer longtemps, malgré ses multiples insuffisances, la Francophonie ne pourra plus se limiter à un mouvement culturel, de partage d’une langue, ni même de valeurs. Elle doit, à l’image de multiples autres regroupements trouver la voie d’une conciliation entre la culture et l’économie, entre la culture te le développement.

Comment l’intelligence économique peut-elle contribuer à accroître la compétitivité de la Francophonie économique ?

La Francophonie économique ne doit être ni un slogan ni un vœu.  Pour se mettre en place et devenir une réalité, il faut que les acteurs économiques du monde francophone occupent une place en rapport avec la taille de leurs pays, de leurs populations. Cette ambition suppose de bousculer des situations existantes. Elle suppose une croissance économique plus rapide de l’ensemble francophone que le reste du monde. Cela est loin d’être le cas aujourd’hui. Pour ce faire, le monde francophone doit se positionner sur les secteurs porteurs, ceux à haute valeur ajoutée. Il doit favoriser l’évolution de ses acteurs économiques et leur montée en gamme dans les chaînes de valeurs internationales. Cela devra passer nécessairement par des investissements massifs dans l’éducation, mais également par l’adoption des meilleurs standards internationaux, tant au niveau des process de production que de la gouvernance des institutions ou la gestion des affaires publiques. C’est à ce niveau-là que l’intelligence économique pourra changer la donne. Conduite correctement, elle pourra être en permanence à l’écoute des signaux faibles augurant de transformations majeures. Mise au service des acteurs économiques de la région, elle pourra abréger le chemin, leur faire gagner un temps précieux et les mettre sur la voie de la transformation efficiente.

Qu’est-ce qui vous a motivé à parrainer le festival de l’intelligence économique francophone qui aura lieu à Djerba le 17 novembre 2022 ?

La proposition de parrainer le festival de l’intelligence économique francophone qui aura lieu à Djerba le 17 novembre 2022, m’a été faite courant août dernier, par Guy Gweth, président du Centre africain de veille et d’intelligence économique. J’étais alors décidé de la décliner poliment. Les délais me semblaient courts. Mon emploi du temps sur les mois qui nous séparaient de l’évènement était déjà chargé. Plus important que tout cela, j’étais dubitatif sur la capacité d’organiser un évènement pertinent alors que planaient encore sur le sommet de la Francophonie des doutes et des hésitations. J’ai quand même accepté de m’entretenir du sujet avec M. Gweth, que je ne connaissais pas encore. En un peu plus d’une heure d’échanges, Guy m’a charmé. Il a su attiser en moi la flamme de l’engagement en faveur de cette langue que je chéris tant, de l’Afrique dont j’ai fait ma Mecque depuis quatre décennies. Je n’ai plus eu la moindre hésitation. Notre ambition est commune, notre engagement est partagé. La cause est si belle qu’elle méritait indiscutablement de lui donner sa chance.

Interview réalisée par Financial Afrik